login
login

Bulletin Quotidien Europe N° 13333

23 janvier 2024
SOCIAL - EMPLOI / Social
Travailleurs des plateformes numériques, la Présidence belge du Conseil de l'UE donne encore quelques gages aux pays les plus réfractaires pour obtenir un accord des États membres le 24 janvier
Bruxelles, 22/01/2024 (Agence Europe)

La Présidence belge du Conseil de l’UE a transmis aux États membres au cours du week-end du 20 janvier un nouveau document de compromis sur les travailleurs des plateformes numériques afin de solliciter un mandat au Coreper le 24 janvier et de reprendre les discussions en trilogue avec le Parlement européen le 30 janvier.

Le dernier texte proposé par la Présidence belge, daté du 20 janvier, amende légèrement le texte du 10 janvier, dans un sens encore relativement favorable aux pays membres qui avaient rejeté le texte négocié avec le PE le 22 décembre (EUROPE 13330/25, 13320/14) et qui souhaitaient revenir à l’orientation générale du Conseil de l’UE de juin 2023.

Ainsi, toujours pour satisfaire certains des ces pays, le critère ou indicateur b, selon la terminologie reprise par la Présidence belge, a été réécrit de manière plus stricte, avec l’ajout de l'adjectif de supervision « étroite » des performances du travailleur par « des moyens électroniques » (la mention est ici réintroduite après avoir été supprimée du texte du 10 janvier).

Des délégations, comme la France notamment, avaient exprimé un mécontentement pour ce qui est de ce critère b, dont l’ancienne formulation était jugée trop large.

Le nouveau texte précise aussi, dans le considérant 32, le langage de cet indicateur b, qui devrait inclure des éléments concrets montrant que la plateforme numérique de travail « supervise étroitement, par des moyens électroniques, l'exécution du travail en évaluant ou en faisant régulièrement le point sur l'exécution ou l'avancement du travail, en suivant ou en vérifiant de manière approfondie la qualité des résultats du travail des personnes, y compris par la surveillance par caméra, le suivi de la localisation, en comptant les frappes au clavier, en effectuant des captures d'écran ou en utilisant d'autres fonctions d'ordinateurs ou de smartphones. La supervision ne comprend pas l'utilisation d'outils électroniques, tels que la géolocalisation, pour faire correspondre la personne effectuant le travail de plateforme et le destinataire du service ».

Le texte du 20 janvier précise encore le langage sur l’exclusion de la procédure de présomption légale des autorités fiscales, pénales ou de sécurité sociale, réclamée par de nombreuses délégations, se justifie la Présidence. Il maintient tel quel le considérant 31, appelé par ses détracteurs « dérogation française », car correspondant au modèle français en place pour ces travailleurs.

Ce considérant permet ainsi de s’assurer qu’une plateforme déjà soumise à des obligations en droit national, notamment en vertu d’accords collectifs, ne sera pas considérée comme remplissant un critère/indicateur au titre de la directive.

Il a notamment été précisé (dans ce considérant 31, dont la dernière rédaction reste toutefois semblable à celle du 10 janvier, NDLR), que « les conventions collectives applicables aux véritables travailleurs indépendants solitaires font partie des obligations légales auxquelles les plateformes numériques de main-d'œuvre pourraient devoir se conformer et qui ne doivent donc pas être considérées en tant que telles comme remplissant un ou plusieurs indicateurs de contrôle et de direction pour le déclenchement de la présomption légale », explique ainsi la Présidence dans une note accompagnant ce nouveau compromis.

Le dernier compromis assouplit aussi le volet sur les sanctions contre les plateformes et ne fait plus référence au chiffre d’affaires de la compagnie

La version du 20 janvier renforce dans le même temps le langage sur une clause de non-régression et, dans ce qui semble être un geste envers le PE, insiste sur le fait que les États membres peuvent toujours allonger, à leur niveau, la liste des critères/indicateurs permettant d’identifier le contrôle sur le travailleur.

Le texte précise ainsi que « l'article 5, paragraphe 1 n'affecte pas les règles nationales prévoyant un nombre plus élevé d'indicateurs ou des procédures de reclassement plus favorables aux travailleurs des plateformes ».

Sur le volet des inspections automatiques dans une plateforme quand une décision de reclassification en salarié est rendue au bénéfice de l’un de ses travailleurs, la Présidence belge explique avoir réintroduit cette idée dans le texte.

« Les délégations ont critiqué l'article 7, qu'elles jugent trop normatif en ce qui concerne le travail des autorités chargées de l'application de la législation et elles ont souligné que cela empiéterait sur les pouvoirs discrétionnaires des inspections du travail », fait valoir la Présidence.

Toutefois, « étant donné que ce point est très important pour le Parlement européen et qu'un changement de statut d'emploi confirmé par une décision finale doit, de toute façon, être pris en compte par les autorités de contrôle lorsqu'elles prennent leur décision discrétionnaire sur les contrôles et inspections ultérieurs, cette idée a été intégrée dans l'article 7, paragraphe 1, point c) et dans le considérant 38 ».

Dans sa note d’explication, la Présidence belge explique en tout cas qu’il reste très peu de temps aux colégislateurs pour valider cette directive, qui représente, selon elle, un progrès dans l'acquis social de l’UE et pour les droits des travailleurs européens. Elle invite donc les États membres à accepter ce 24 janvier un texte qu’elle jugé équilibré.

Plusieurs sources au PE estiment cependant ce texte très en deçà de l’accord provisoire trouvé avec la Présidence espagnole et voient mal comment les différents rapporteurs pourraient, eux, accepter ce dernier projet. Une réunion des rapporteurs du PE est également prévue le 24 janvier.

La Confédération européenne des syndicats rejette en tout cas ce texte et sa présomption légale de salariat « inopérante », qui affaibliraient encore la situation actuelle de ces travailleurs (voir article lié)

Liens vers les documents : https://aeur.eu/f/aig ; https://aeur.eu/f/aih (Solenn Paulic)

Sommaire

ACTION EXTÉRIEURE
Invasion Russe de l'Ukraine
SOCIAL - EMPLOI
ÉCONOMIE - FINANCES - ENTREPRISES
INSTITUTIONNEL
POLITIQUES SECTORIELLES
DROITS FONDAMENTAUX - SOCIÉTÉ
CONSEIL DE L'EUROPE
BRÈVES
Kiosque