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Bulletin Quotidien Europe N° 13224

18 juillet 2023
ACTION EXTÉRIEURE / AmÉrique latine
Européens et Latino-américains amorcent un rapprochement en se focalisant sur leurs intérêts communs
Bruxelles, 17/07/2023 (Agence Europe)

Les dirigeants des pays de l'Union européenne, d'Amérique latine et des Caraïbes ont renoué des liens distendus par la pandémie de Covid-19 et le manque de volonté politique, lundi 17 juillet à Bruxelles à l'entame du premier jour du sommet UE/CELAC. L'objectif affiché est de se concentrer sur les sujets d'intérêt mutuel - la lutte contre le changement climatique, les investissements, la lutte contre les inégalités sociales, la sécurité ou le multilatéralisme - en faisant en sorte que les sujets qui peuvent diviser, comme l'Ukraine, ne court-circuitent pas les travaux.

Le président du Conseil européen, Charles Michel, a souligné l'importance de discuter, au plus haut niveau politique, « dans un esprit de respect mutuel ». « Personne ne veut faire la leçon à qui que ce soit », a-t-il assuré, espérant que les sommets avec les pays latino-américains et caribéens pourront à nouveau se tenir tous les deux ans. D'après le président brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, ce sommet doit servir à « envoyer au monde un signal clair: des régions aussi importantes sur le plan stratégique que l'Europe et la CELAC ont un agenda de coopération, d'accroissement des échanges et des investissements ».

« On ne part pas de zéro, mais l'actuel contexte politique, l'urgence climatique, les profondes inégalités sociales exigent des efforts et d'adapter la coopération bi-régionale à des défis qui ne permettent aucun retard », a considéré le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez. Il s'est éclipsé jeudi soir pour faire campagne à Huesca en Espagne et revenir à temps pour participer à la deuxième journée de travail.

Plusieurs accords concrets ont, d'ailleurs, été conclus en marge du sommet. Cependant, le nombre et la diversité des pays participants compliquent la compréhension commune et la capacité à parler d'une seule voix. Pour preuve, la rédaction de la déclaration finale du sommet ne semblait pas finalisée, lundi en fin d'après-midi et une nouvelle réunion des ambassadeurs des États membres auprès de l'UE (Coreper) pouvait être convoquée pour poursuivre la rédaction, même si une telle probabilité avait diminué, selon une source diplomatique.

Parmi les points de friction figure la référence à l'agression militaire russe de l'Ukraine. Les Européens poussent pour que cette déclaration inclue au moins une référence à la violation des principes et valeurs fondamentales de la Charte de l'ONU. « Nous discutons toujours », a reconnu M. Michel, notant qu'« une vaste majorité » des pays de l'UE et de la CELAC avaient condamné l'invasion russe lors de l'adoption de résolutions à l'Assemblée générale des Nations Unies.

Le Premier ministre de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Ralph Gonsalves, dont le pays assure la présidence pro tempore de la CELAC, ne s'est pas risqué à anticiper le résultat des négociations en cours. Il a constaté qu'individuellement, des pays latino-américains ou caribéens, comme le sien, avaient condamné l'agression militaire russe, « mais d'autres se sont abstenus ou ont pris une autre position ». Selon lui, la présence à Bruxelles du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, n'aurait pas forcément été utile.

M. Gonsalves a, par ailleurs, souhaité que le texte final évoque « l'héritage historique du génocide et de l'esclavage » et les formes de réparations possibles. Vendredi 14 juillet, une source diplomatique européenne avait estimé qu'une solution pouvait faire référence à la Déclaration de Durban de 2001.

Partenariats politiques

Lundi, trois protocoles d'accord ('memorandum of understanding') ont été conclus entre l'UE et l'Équateur, le Salvador et le Honduras pour renforcer le dialogue politique avec ces trois pays.

Concernant le Salvador et le Honduras, il s'agit d'organiser des consultations régulières avec l'UE pour « échanger sur les sujets et problématiques d'intérêt mutuel ».

Le protocole d'accord avec l'Équateur va plus loin : il identifie huit priorités à poursuivre dans les relations bilatérales, parmi lesquelles l'environnement, les questions socioéconomiques, la migration, les investissements. L'UE espère aussi que ce protocole d'accord ouvre la voie à un potentiel accord politique global bilatéral avec Quito.

Partenariats économiques

De manière plus ciblée, l'UE a également entériné un protocole d'accord (MoU) avec l'Argentine sur l'énergie. Celui-ci définit des pistes de coopération sur l'énergie renouvelable, l'hydrogène ou encore les émissions de méthane. Il s'agit, pour les deux partenaires, de travailler ensemble pour développer et promouvoir l'énergie renouvelable ainsi que l'efficacité énergétique. Ils s'engagent, de plus, à réduire les fuites de méthane dans la chaîne d'approvisionnement des gaz fossiles.

Voir le MoU avec l'Argentine: https://aeur.eu/f/84m

Mardi, l'UE et le Chili devraient signer un MoU focalisé sur les matières premières critiques cette fois (EUROPE 13177/15).

Lors de précédents sommets européens, le chancelier allemand, Olaf Scholz, avait souligné l'importance de nouer des accords 'gagnant-gagnant' où les matières premières extraites sont également valorisées en Amérique latine avant d'être exportées vers l'UE.

L'accord UE/Mercosur

Le partenariat économique le plus significatif, quant à lui, attend encore d'être formalisé. Si l'accord commercial UE/Mercosur fait l'objet de nombreuses convoitises en ce début de sommet, il ne devrait toutefois pas bénéficier d'avancées concrètes pendant le sommet. La rencontre est surtout « l'occasion de s'écouter et mieux se comprendre », a indiqué M. Michel. 

L'UE attend actuellement un retour des pays du Mercosur après sa proposition de lettre additionnelle à l'accord (EUROPE 13148/21). Celle-ci précise les obligations des deux parties en matière de développement durable. Le Brésil a fait parvenir, vendredi, une version provisoire de la contre-proposition aux trois autres pays du Mercosur. Cela constituera la base des prochaines discussions entre les deux blocs. 

L'UE et le Mercosur cultivent toujours l'espoir de s'entendre avant fin 2023, comme l'ont réaffirmé le président Lula, le Premier ministre Sánchez ainsi que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. 

Pour le président brésilien, il est important que l'UE « comprenne le besoin de protéger le mode de vie de 50 millions de personnes qui vivent dans la forêt amazonienne ». Il a souligné l'ambition de son pays dans la production d'énergies renouvelables et de mettre un terme à la déforestation d'ici à 2030. Et il a aussi critiqué l'attitude de l'UE dans le cadre de l'accord, qui consiste, selon lui, à imposer des standards environnementaux accompagnés de sanctions (EUROPE 13199/14, 13209/37).

Sur l'accord avec le Mercosur, « la position de l'Autriche est claire », a rappelé le chancelier autrichien, Karl Nehammer, en référence à l'opposition du Parlement national à la ratification en l'état de cet accord. Il a dit attendre des réponses à la proposition européenne.

'Global Gateway'

En amont du sommet, Mme von der Leyen a annoncé un paquet d'investissements de 45 milliards d'euros dans les pays d'Amérique latine et des Caraïbes jusqu'en 2027 dans le cadre de l'initiative 'Global Gateway'. Les financements doivent soutenir des projets dans le secteur des matières premières critiques, du numérique ou encore des transports. 

De plus, la Banque européenne d'investissements (BEI) financera des projets en faveur de l'action climatique à hauteur de 800 millions d'euros en Argentine (200 millions), au Chili (300 millions) et au Brésil (300 millions).

En marge du sommet UE/CELAC, le Parlement européen a rappelé qu'il compte ouvrir une antenne du PE dans la région Amérique latine et des Caraïbes. Cette décision contribue à renforcer la dimension parlementaire dans les représentations extérieures de l’UE, en mettant l’accent sur les assemblées parlementaires multilatérales et les organisations internationales, a-t-il rappelé dans un communiqué. (Léa Marchal et Mathieu Bion)

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