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Le quart d'heurope, le 15 minutes d'Agence Europe
Épisode 2 : Autonomie stratégique : quel horizon pour la compétitivité de l'UE ?
Avec Nithya Paquiry et Léa Marchal - 23/4/2024

Les dernières années et leurs crises successives ont révélé les fragilités de l’autonomie stratégique de l’Union européenne. Vulnérable face aux concurrents de taille que sont les États-Unis et la Chine, l’UE est pressée d’agir afin de renforcer sa compétitivité. Dans cet épisode, il s’agira d’identifier ses moyens d’action et les enjeux politiques qu’ils impliquent, tant au niveau des États membres qu’au sein des groupes parlementaires, afin de mieux appréhender, en amont des élections, les options qui s’offrent à l’UE en matière de stratégie économique.

Dans une période marquée par des crises successives, l'Union européenne se confronte à la nécessité d'accroître son autonomie stratégique. Ce besoin urgent de réduire sa dépendance dans des domaines critiques tels que la défense, la sécurité, et l'énergie a été exacerbé par la pandémie de Covid-19 et le conflit en Ukraine. Ces événements ont révélé des vulnérabilités significatives dans la structure économique et industrielle de l'Europe.

Et pour cause, depuis les années 1990, l'écart économique entre l'UE et les États-Unis s'est creusé significativement. Alors que le PIB américain a crû de près de 60%, celui de l'Europe n'a augmenté que de 30%. De plus, l'Europe peine à rivaliser dans le domaine des technologies de pointe telles que les semi-conducteurs et les batteries, des secteurs dans lesquels les États-Unis et la  Chine la dominent.

Face à cette situation, l'Union européenne est poussée à agir.

Le dernier sommet européen a ainsi été tourné vers la nécessité d'une action  immédiate pour améliorer la compétitivité de l'UE. Alors, quels plans d'action  l'Union européenne peut-elle mettre en oeuvre pour booster son autonomie stratégique ? Est-il encore temps pour les Vingt-Sept de se positionner plus solidement sur la scène mondiale ? Quel est l'enjeu pour ces élections ?

L’IRA, l’initiative américaine de 2022 (EUROPE 13100/3). visant à réduire  l'inflation par des subventions massives dans les technologies vertes -  batteries pour véhicules électriques, panneaux photovoltaïques - a souligné  l'urgence pour l'Europe d'améliorer sa compétitivité. Par ailleurs, la  compétition asiatique et notamment chinoise, qui repose sur des subventions  massives, jugées déloyales,va accentuer cet impératif.

Compétitivité et intégration du marché

Le manque d’intégration du marché intérieur de l’UE est également sujet à de multiples critiques, principalement dans les secteurs stratégiques comme  l'énergie, les télécoms, et les services.

Face à ces problématiques, l'UE a réagi par l'adoption de leviers législatifs tels que le Chips Act (EUROPE 13229/23), l’acte sur les semi-conducteurs, l'Acte  sur les matières premières critiques (EUROPE 13292/6) et l'Acte pour une  industrie 'zéro émission nette' (NZIA) (EUROPE 13352/20).

Ces textes tendent à faciliter l'implantation d'usines et l'extraction de matières premières en Europe, en espérant voir des résultats tangibles  comme l'ouverture de nouvelles entreprises de semi-conducteurs.

Clivages politiques sur la stratégie économique européenne

Sur le plan politique, les divergences entre les États membres et les groupes  politiques européens sur la manière de soutenir l'industrie et de financer ces  initiatives sont révélateurs : les groupes de droite, notamment le PPE,  plaident pour une réduction des charges administratives et une moindre  réglementation, tandis qu’à gauche de l’hémicycle, où l’on voit le ‘Pacte vert  européen’ comme une opportunité plutôt qu'une contrainte, on insiste sur les droits sociaux et environnementaux,

L’ancien Premier ministre italien, Enrico Letta, a présenté lors du dernier  Sommet Européen des 17 et 18 avril (EUROPE 13394/1), un rapport  ambitieux, fruit de consultations à travers l'UE. Ce rapport vise à mobiliser  l'épargne européenne pour financer la transition écologique, à renforcer le  marché intérieur, et à simplifier la réglementation pour stimuler les investissements.

Cependant, malgré ces initiatives, l'UE reste confrontée à la nécessité de  trouver un équilibre entre protectionnisme et ouverture. Si les mesures  antidumping et les enquêtes sur les pratiques commerciales déloyales  démontrent que l'UE accentue sa fermeté afin de préserver ses industries,  celle-ci reste ouverte à la concurrence loyale.

De fait, ce sera tant la capacité des États membres à trouver un terrain  d’entente dans ce contexte, pour une stratégie économique commune, que  celle à réagir rapidement aux crises, et à équilibrer ses principes d'ouverture  et de protection de ses atouts économiques, qui garantira à l’UE la solidité de  son autonomie stratégique.